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Suite de "Raïssa". "La main coupée du dieu Tyr" est le second album de la série Louve. Il a paru le 16 novembre 2012. L'album est scénarisé par Yann et dessiné par Roman Surzhenko. Le dessinateur a réalisé un grand nombre de dessins préparatoires pour cet album, en voici quelques-uns.
(déplacez votre souris sur l'image)
Pour la première fois dans la collection des Mondes de Thorgal, la couverture n'est pas réalisée par Grzegorz Rosinski mais par le dessinateur russe de l'album. Voici d'ailleurs un cadeau du dessinateur, 6 étapes de la conception de la couverture, de l'esquisse initiale à la couverture finale. Recadrages, exploration des teintes, recherches sur l'arrière-plan... Vous saurez tout !
Après un premier album très réussi, Surzhenko continue à régaler avec un dessin précis et complet, fourmillant de détails. Il bâtit ses plans en jouant notamment sur l'épaisseur du trait, avec des volumes et ombrages hachurés, très "rosinskiens". Les personnages ont des postures plus naturelles que dans le premier tome, et leurs expressions sont parlantes. Les cadrages et postures sont très théâtraux, on se croirait sur scène. Une marque de fabrique du dessinateur. L'album est rythmé par des sauts continus entre différents lieux, certains hérités de la série principale, d'autres créés pour l'album. On retourne donc dans le village viking d'Aaricia, avec une ambiance printanière qui indique le temps passé depuis le départ de Thorgal à la poursuite des mages rouges. On fait aussi un détour très symbolique dans le Deuxième Monde, passage obligé vers les mondes du rêve et du divin pendant l'époque Van Hamme. Un Deuxième Monde au rendu impeccable, notamment grâce aux superbes couleurs de la coloriste Graza. Guidé par Yann, Surzhenko a créé deux mondes que tout oppose : le paradis d'Azzalepstön et l'enfer de Fenrir. Le paradis du mage est chaud et confortable. Ses habitants sont jeunes et beaux. Ils vivent dans le jeu, le confort et l'insouciance. Ils sont nus ou presque, le vêtement devenu une protection inutile et un rappel d'origines perdues. Les auteurs se sont fait plaisir en créant le royaume du chaos, enfer du demi-dieu Fenrir. Un lieu unique dans la série, fourmillant d'une vie incontrôlée, aux antipodes du mignon bestiaire d'Azzalepstön. La plupart des scènes de ce royaume sont nocturnes et brumeuses. Une ambiance de mort, un lieu où les gentils animaux et les plantes accueillantes cachent des pièges mortels. Cet enfer donne son nom au prochain album...
Voilà une autre spécificité de cette série, marque de fabrique du scénariste Yann, cette fois ! Jean Van Hamme est un auteur qui ne manque pas d'humour, mais qui en a fait peu usage dans Thorgal. Il faut gratter pour trouver des scènes amusantes. Van Hamme décrivait d'ailleurs son héros comme un gars carré, sans humour. Yann n'hésite pas et se prend au jeu, libéré des contraintes de la série principale et de son héros sans humour. Il se lâche dans cet album, notamment grâce au dieu multiusage de la série, l'aimable, le pratique Vigrid. Notre dieu-à-tout-faire revient donc ici faire son show. Il est l'informateur, le relayeur, le transporteur. Il titille Aaricia, gratouille Louve (et la met par terre), charme et exaspère la Gardienne. Tout en remettant Louve sur la route de son destin hors normes. On retrouve même cet humour dans le royaume du chaos, avec ses lianes-serpents, son pont-caméléon et ses écureuils aux dents de rasoir.
Comme dans les derniers albums de Thorgal, les auteurs ont fait le choix d'avantager la quête, au détriment parfois des personnages. L'aventure prime ! Le clonage de Louve interroge. Qu'est-ce qui différencie vraiment les deux personnages ? La Louve du paradis, qu'on attendait docilisée, apathique, est au final aussi aventureuse que dans l'album précédent. Elle organise la révolte et mène sa barque, au point de rejoindre sa moitié sauvage de l'autre côté des mondes. Son attitude face à Vigrid et à la Gardienne sent l'insolence. A peine un coup de mou, donc. La Louve sauvage est carrée, entêtée, droite dans ses bottes (de poil). Avec une belle impulsivité et un goût affiché pour la viande crue. Mais son compagnon, sensé être lui aussi un clone sauvage, s'affiche calme et réfléchi, adepte du bon petit feu qui réchauffe. A moins que ce personnage au visage masqué ne soit pas ce qu'il paraît être ? Les personnages ne jouent donc pas au jeu des contraires, pas autant que les lieux qu'ils occupent. A se demander si, au moment des retrouvailles, les deux petites filles ne pourraient pas continuer à exister. D'autant que la Louve sauvage n'est sûrement pas prête à rentrer à la maison.
Après un premier album qui prenait son temps, ce second tome met le turbo et enchaîne les plans. Il y a du rythme et du jeu. Le scénariste s'affranchit de certains codes de la série-mère, faisant de "Louve" une série à part, à la fois proche et déconnectée des aventures habituelles de Thorgal. Un peu comme l'ont été les aventures de Jolan dans le cycle de Manthor. La partie consacrée à Aaricia est le point d'ancrage de l'album dans l'univers thorgalien. Le lieu et les personnages sont familiers. Le passage de Vigrid dans les deux mondes, celui de Louve et celui d'Aaricia, donne à l'histoire de la petite fille une caution du "réel" qui nous permet d'être sûrs qu'elle n'est pas Alice, endormie au fond des bois, visitant le pays des merveilles. Ce petit lien est peut-être ce qui a manqué aux aventures de Jolan au pays des dieux. On suivait Jolan et Thorgal, mais sans que leurs routes ne se croisent jamais. A suivre dans "Le royaume du chaos". Voici cinq planches extraites de "La main coupée du dieu Tyr", les cinq premières pages de l'album. On y retrouve les "deux" Louve, toutes les deux en grand danger, la première perdue dans un environnement hostile peuplé de monstres, la deuxième guettée par l'ennui et la perte du goût de vivre...
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